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  • L'esprit républicain avant tout

    En France, le choc provoqué par l'assassinat de Hervé Gourdel en Algérie entraîne des condamnations de la part de nombreux responsables religieux, de toutes confessions, sur le registre bien compréhensible du : "Les religions ne sont pas cela! Ne tombons pas dans le piège de l'amalgame que nous tendent les terroristes!" En délivrant des messages de paix, ces responsables sont dans leur rôle, nécessaire et complémentaires d'autres actions. Les pompiers contribuent à éteindre les incendies. Et il ne viendrait à l'idée de personne d'aller critiquer l'intervention de soldats du feu. Cela fait partie de la vie normale d'une société. La passivité de ces responsables, seule, serait étonnante.

    Néanmoins, il me semble déceler un danger invisible dans cette vague de condamnations des derniers jours, qui ont ou vont maintenant déboucher sur des appels nationaux, et manifestations - en plus de celles qui ont pu déjà avoir lieu de façon sporadique.

    Ce danger réside dans la "confessionnalisation" des mobilisations, qui n'interviennent pas d'abord, pas toujours, pas assez, sous la bannière républicaine - même si elles sont bien sûr ouvertes aux non-croyants.

    Comment sera perçue cette réaction confessionnelle, même inter-religieuse, dans un pays dont une frange croissante, on le sait bien, est exaspérée par la poussée du fait religieux, dans les entreprises ou les administrations, au point de ne plus hésiter à voter à l'extrême?

    La République n'est pas parfaite. Mais elle est le cadre dans lequel nous vivons, en France. Elle garantit le libre exercice des cultes et la liberté d'expression, dans les limites fixées par la loi. Il ne s'agit pas de dénier aux responsables religieux le droit d'agir. Ce serait très grave. Ils ont le grand mérite de mouiller la chemise quand le reste de la société a succombé à une forme d'indifférence ou de passivité. Mais ils sont, nous sommes d'abord, des citoyens de la République française. Et c'est la République, ce pacte républicain que beaucoup de personnes nous envient encore à travers le monde, qu'il s'agit aujourd'hui de faire vivre et de défendre. Sans cela, nous n'irions que vers un morcellement croissant de notre société. Et vers de pernicieuses polémiques qui ne feraient qu'alimenter les guerres communautaires en gestation, comme l'illustre celle qui consiste maintenant à dire : "Les musulmans (sic) n'ont pas à se justifier des faits et gestes de personnes qui n'ont rien à voir avec l'islam. Allait-on demander à des catholiques français (sic) de condamner les attentats de l'IRA en Irlande?"

    Les religions ne sont pas responsables, en France, de la dérive extrémiste de jeunes qui partent faire la guerre en Syrie ou en Irak.

    C'est à la République (en partie héritière des valeurs des trois monothéismes), et à elle seule, d'assumer ses responsabilités, d'assurer la surveillance de ses citoyens sans tomber non plus dans la restriction des libertés individuelles, et de faire en sorte que l'idéal républicain fasse davantage rêver que de sinistres drapeaux noirs aux lettres de sang.

    Il y a des jours où je rêverais de l'instauration d'un service civique obligatoire de dix mois pour les femmes et pour les hommes, rémunéré comme l'était le service national. Ils interviendraient dans des quartiers déshérités, dans des maisons de retraite auprès de "vieux qui ne parlent plus" abandonnés de tous, dans des zones rurales ou urbaines isolées...

    Utopique? En ces temps de cauchemar, rêvons un peu!

    Nicolas Ballet

    (reproduction de ce texte autorisée avec mention de la source)

     

     

     

     

     

     

     

  • Et si on allait à la piscine de Tibhirine?

    Tous les ans, Jean-Marie Lassausse adresse d'Algérie, en général vers la fin de l'été, une lettre circulaire aux amis de Tibhirine pour les informer de la situation de l'ex-monastère, dont il a la "charge" depuis une quinzaine d'années : entretien avec les ouvriers algériens des vergers de 17 hectares, remise en état ou réaménagement de bâtiments, accueil des visiteurs (en majorité algériens) curieux de découvrir le site et désireux, pour certains, d'aller se recueillir sur les tombes des moines.

    Sa dernière communication montre que les travaux ont bien avancé : ainsi, un parquet flottant a été posé dans la chapelle, "ce qui renforce sa beauté et son intimité". Un nouveau laboratoire pour la fabrication des confitures a été aménagé sous l'appartement d'accueil (à gauche en entrant, au niveau de l'ancienne infirmerie de frère Luc). Et, chose importante pour l'irrigation des cultures, un deuxième bassin de rétention d'eau de source (laquelle jaillit près du petit cimetière) a été creusé mi-août. Abrité par des roseaux, il peut même servir... de piscine! D'autres projets existent pour plus tard.

    Mais le plus important à mentionner, c'est qu'un Belge de 57 ans, Frédéric, est arrivé pour seconder Jean-Marie Lassausse, à la suite de bien d'autres volontaires, auxquels les autorités algériennes avaient délivré des autorisations de séjour (chose à mon avis inimaginable il y a dix ans). Ce Belge devrait rester pour une longue durée. Non seulement sa présence est la bien venue pour l'accueil des visiteurs en journée - une tâche extrêmement prenante car les coups de sonnette sont à certaines périodes très nombreux - mais elle soulage Jean-Marie sur d'autres plans : Frédéric fabrique le pain et le fromage de brebis; il assure aussi une grande partie de la cuisine.

    L'histoire ne dit pas s'il prépare de temps en temps des frites. Belges bien sûr. Et surtout, aussi croustillantes à l'extérieur et moelleuses à l'intérieur, que celles de frère Luc en son temps. Ah, l'ivresse des frites de Luc... Le plus sûr chemin vers le péché de gourmandise! "La bonne cuisine, c'est important pour le moral d'une communauté" me rappelait frère Jean-Pierre. Frère Luc lui racontait qu'il était, pour cette raison, plus difficile de trouver des cuisiniers que des abbés.

    Bientôt vingt ans après l'enlèvement et la mort des moines, la paix est revenue dans cette partie de l'Algérie mais les conditions de vie restent rudes autour de Tibhirine et Médéa : l'isolement en altitude, les hivers rigoureux y rendent les journées parfois longuettes.

    Frédéric sait ce qu'il lui reste à faire!

     

    Si vous souhaitez contribuer à l'entretien de l'ex-monastère, vous pouvez contacter l'association "Les Amis de Tibhirine" http://www.moines-tibhirine.org/index.php?option=com_content&view=article&id=57:association-les-amis-de-tibhirine&catid=49:associations&Itemid=81