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Deux nièces de Frère Paul réagissent au livre

Odile Chessel et Françoise Boëgeat-Chessel, nièces de Frère Paul, martyr de Tibhirine, ont envoyé chacune un texte, tous deux destinés à être publiés ce blog.


L'esprit de Tibhirine
par Odile Chessel

Quiconque l’a faite ou la fera, cette route jusqu’à Notre-Dame de l’Atlas de Midelt, a ressenti ou ressentira sans doute ce qu’a si justement décrit Nicolas Ballet dans son livre. Ce récit est déjà celui d’une rencontre. Celle de frère Jean Pierre Schumacher rescapé de l’enlèvement des moines de Tibhirine. Nicolas a bien su restituer l’émotion qui nous submerge au contact de cet homme à la silhouette si frêle et à la voix si douce, marqué par la douleur de la perte de ses frères mais rempli aussi de la grâce du message laissé dont il est encore porteur. Ce récit est aussi celui de la découverte de la vie monastique de cette petite communauté de Notre-Dame de l’Atlas qui avec discrétion perpétue les rituels cisterciens en terre d’islam et les liens tissés avec le voisinage ne sont pas sans rappeler ceux que tissait la communauté de Tibhirine (en Algérie). Si l’on accepte l’invitation à se rendre à Tatiouine (sur les sommets de l'Atlas, au-dessus de Midelt), ce que fit Nicolas Ballet, on se rendra compte alors de ce que signifie la présence à l’autre telle que la vivent Barbara et Marie, les sœurs franciscaines au service des populations nomades berbères. C’est donc le récit de la rencontre d’un homme dans son environnement monastique et marocain auquel nous convie Nicolas Ballet tout au long de ses chapitres qui sont autant d’étapes du voyage. On rentre de ce voyage transformé et plein d’interrogations sur le sens de ces vies données et surtout sur l’engagement des uns et des autres rencontrés en chemin.


Une question de transmission
par Françoise Boëgeat-Chessel

En mars 2011, je rencontre à Lyon Nicolas Ballet pour la première fois, dans le cadre d’une commémoration inter-religieuse à la mémoire des Frères de Tibhirine. En tant que journaliste, il «couvre» l’événement. Il a réalisé plusieurs articles remarqués sur Tibhirine à cette même période. D’emblée, transpire son intérêt pour l’histoire de ces hommes. Lorsqu’il me confie par la suite le projet de ce livre, je ne suis pas étonnée. Ce qui me touche, positivement, c’est le fait que la vie de ces moines suscite la curiosité d’un homme d’à peine quarante ans. C’est pour moi le signe d’un esprit ouvert et sensible. Je constate depuis une quinzaine d’années que ceux qui se sentent sincèrement proches des Frères  cherchent à vivre eux-mêmes des liens humains plus simples et plus profonds. Sa première entrevue avec Jean-Pierre, frère-survivant, sera déterminante dans sa décision d’écrire ou plutôt de co-écrire cet ouvrage. Et, ce que je trouve au final magnifique, c’est cela : oser la rencontre et ce qu’il peut en advenir. N’était-ce pas tout simplement Tibhirine : accueillir celui qui vient ? Je ressens dans cet ouvrage la force de la transmission en tant que souhait de donner ce que l’on a reçu et compris de la vie. L’un donne ses mots, son témoignage sur le sens de son expérience personnelle, spirituelle et communautaire. L’autre questionne, écoute, partage. La sensibilité des deux hommes rayonne et ouvre L’esprit de Tibhirine au-delà du lieu géographique, renforçant ainsi son universalité. Nicolas Ballet et Frère Jean-Pierre, en évoquant la vie de l’un mais aussi les rencontres à Midelt, à Tatiouine ou avec le soufi de Médéa, ont su valoriser le fait que Tibhirine s’inscrit dans le cœur et l’esprit plutôt qu’en un lieu. Proche d’un des Frères, j’ai vécu douloureusement cette mort violente et injuste. En même temps, j’ai découvert l’engagement des moines et «le chemin de vie» qu’ils offraient à tous. C’est précieux à recevoir et à dire. En lisant le livre, je me suis à nouveau interrogée: «qu’est-ce qui fait, qu’après avoir vécu un tel drame, il est encore possible de rester positif, altruiste et de lire : confiance?». A travers les lignes, Frère Jean-Pierre a répondu : «En Tibhirine, nous puisons la force de répandre un message d’amour entre les hommes». Ce que nous disent les Frères, c’est de continuer à être un «humble rempart» contre la haine et l’intolérance.

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