L'ouvrage L'esprit de Tibhirine a été livré ce mercredi 22 août 2012 aux éditions du Seuil, à Paris/Montrouge. Il sera en librairie le 6 septembre. Au cours des semaines qui viennent, je vous tiendrai informés sur ce blog des différentes émissions et autres conférences qui seront consacrées à cette enquête de dix-huit mois, menée au Maroc, en Algérie, en Suisse et en France, autour du dernier survivant des moines de Tibhirine, le frère Jean-Pierre Schumacher.

Nicolas Ballet

Voici une présentation succincte du contenu du livre sur le site de l'éditeur :

http://www.seuil.com/livre-9782021085419.htm

Et en voici, pour celles et ceux que cela intéresserait, une présentation plus détaillée, également rédigée par mes soins :

"J'ai le plaisir de vous annoncer la publication, le 6 septembre, au Seuil, de L'esprit de Tibhirine, une enquête d'un an et demi que j'ai menée autour du frère Jean-Pierre Schumacher (le dernier moine et survivant de Tibhirine), et en collaboration avec lui et la communauté Notre-Dame de l'Atlas.

Ce travail est, entre autres, le fruit d'un mois et demi en immersion complète à son monastère de Midelt (Maroc), et de trente heures d'entretien avec ce moine, complétées par d'importantes recherches dans les archives de Midelt, et celles de familles des moines assassinés en Algérie. Il m'a conduit à effectuer trois longs déplacements dans l'Atlas marocain (ainsi qu'à Fès et à son Festival de cultures soufies), à me rendre en Algérie, mais aussi en Suisse et dans diverses régions françaises.

Il prolonge l'enquête que j'avais effectuée début 2011, cette fois sous un angle régional, pour Le Progrès ("Tibhirine : tous les chemins mènent à Lyon") et qui avait obtenu le 3e Prix Varenne (le Prix national de la presse quotidienne régionale).

Cet ouvrage a pour but de montrer en quoi l'esprit qui était celui de Tibhirine (tentative de dialogue avec l'islam), se poursuit en Algérie et ailleurs. Et cela, malgré les difficultés et avec l'espoir de contribuer à apaiser ainsi indirectement les tensions, en Occident, entre communautés. Il y est aussi question du judaïsme, et donc, du dialogue interreligieux au sens large.

Les cinq principaux chapitres, où je fais parler le moine à la première personne :

- reviennent sur la nuit de l'enlèvement des moines en 1996 (de nouvelles informations, totalement inédites, y sont dévoilées), à laquelle frère Jean-Pierre tente de donner une signification;
- retracent l'itinéraire spirituel de frère Jean-Pierre (il a grandi au contact des Juifs en Moselle, puis a été incorporé de force dans la Wehrmacht, avant de faire son séminaire chez les maristes à Lyon et de rejoindre les trappistes en Bretagne);
- abordent pour la première fois par un témoignage direct l'histoire de la difficile relance de Tibhirine en 1964, au lendemain de l'indépendance algérienne, dans l'esprit du concile Vatican II (dont on fêtera en octobre le 50e anniversaire de l'ouverture des travaux);
- posent les bases d'une réflexion sur le dialogue islamo-chrétien (à travers le soufisme mais pas seulement).
- ouvrent des pistes pour la mise en oeuvre d'actions concrètes afin de rapprocher les communautés

De nombreuses informations inédites sont également données sur la vie quotidienne du monastère pendant la "décennie noire" algérienne et sur la "vraie" genèse de la rencontre avec les mystiques musulmans soufis (jusqu'à présent uniquement attribuée à Christian de Chergé et Claude Rault, ce qui relève d'un raccourci historique).

Le livre est illustré, en outre, par cinq reportages/enquêtes au Maroc (où vit frère Jean-Pierre), en Suisse et en Algérie :

- le premier porte sur la mémoire vivante de Tibhirine à Midelt (le monastère abrite le diaire confidentiel de Tibhirine, la bibliothèque aux 5000 ouvrages, de nombreux objets des moines...etc), où se rendent régulièrement des familles des moines martyrs de l'Atlas algérien;
- le deuxième propose un voyage chez les soeurs franciscaines de Midelt qui soignent, à la manière d'un frère Luc, les Berbères jusqu'à 3500 mètres d'altitude, dans les montagnes de l'Atlas marocain;
- le troisième montre comment les moines ont réussi à se faire accepter au Maroc, dans cette ville de Midelt où ont longtemps cohabité les trois monothéismes (il n'existe plus aujourd'hui de présence juive);
- le quatrième est une rencontre en Suisse avec l'un des représentants de la confrérie soufie Alawîyya qui avait participé aux premiers échanges avec Christian de Chergé à Tibhirine (Ribât el-Salâm) : là aussi, sont dévoilées des informations nouvelles sur l'histoire de certaines "images" devenues fameuses, comme celle de l'échelle à double pente figurant le dialogue entre soufis et moines, que ce soufi entretient à sa manière, et avec d'autres, en territoire helvétique;
- le dernier reportage, qui conclut le livre sous la forme d'un épilogue, est un retour au monastère de Tibhirine, dans un but précis qui constitue la "chute" de l'ouvrage

Il est exceptionnel qu'un moine trappiste soit autorisé à témoigner de son vivant, dans un livre, sur l'ensemble de son parcours."